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Leiris - Biographie 1 : jusqu'à la publication de "L'âge d'homme"

L’édition utilisée est :

L’Âge d’homme précédé de De la littérature considérée comme une tauromachie, Paris, Gallimard, 1939 pour le premier texte, « Folio » n°435

 

Pour cette petite biographie, je me suis très largement inspiré :

1) de la chronologie de Louis Ivert qui se trouve dans l’édition de La Règle du jeu, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 2003, pp. xlix-ci ;

2) de la chronologie du même Louis Ivert qui se trouve sur le site http://www.michel-leiris.fr/spip/;

3) de diverses lectures relatives au surréalisme.

Je suis responsable des erreurs.

 

Michel Leiris est né à Paris le 20 avril 1901. Sa famille bourgeoise et cultivée habite le xvi° arrondissement de Paris. Marie-Madeleine Caubet (1865-1956), sa mère était une catholique fervente. Elle avait fréquenté l’université de la Sorbonne. Elle parlait couramment l’anglais. Eugène Leiris (1855-1921) son père fut agent de change. Il a été notamment l’homme d’affaires d’Eugène Roussel, puis de son fils l’écrivain Raymond Roussel (1877-1933) écrivain admiré de nombreux surréalistes. Il est le dernier d’une phratrie de quatre enfants dont Madeleine, une sœur morte en 1897 à l’âge de trois ans. Son frère aîné, Jacques (1896-1981) est le « frère ennemi » de L’Âge d’homme (p.113 et sq.). Le second, Pierre (1897-1975) est le « frère ami » (p.119 et sq.). Ses parents élèvent aussi Juliette Leiris (1888-1992), fille du frère cadet d’Eugène Leiris qui est mort avant sa naissance et dont l’épouse devenue dame de compagnie d’une aristocrate galloise ne peut s’occuper. Les Leiris la font passer pour leur fille. Elle est la grande sœur de L’âge d’homme (p.26), une preuve que la sincérité a des limites.

En 1904, ses parents s’installent dans le quartier bourgeois d’Auteuil. Michel fréquente des établissements privés.

À l’été 1908, la famille Leiris voyage en Suisse.

À partir de 1909, Marguerite Roussel (1847-1911), la mère de l’écrivain, met à la disposition des Leiris sa loge à l’Opéra. Le jeune Michel fréquente ainsi le palais Garnier. Il y acquiert une connaissance du répertoire classique mais également découvre des œuvres contemporaines comme la Salomé de Richard Strauss qui est joué en mai 1910 (cf. L’Âge d’homme, pp.92-95).

L’été, les Leiris voyagent en Belgique et aux Pays-Bas où Michel découvre l’œuvre de Rembrandt (1606-1669) à Amsterdam et à La Haye.

Au printemps 1910 les Leiris assistent à une représentation de la Carmen (1875) de Bizet (1838-1875) à Bruxelles. C’est Claire Friché (1878-1968) la « Tante Lise » de L’Âge d’homme (p.90) qui joue Carmencita (p.91). Elle est veuve de Camille Chassevent (1860-1909) un cousin de la mère de Michel (L’Âge d’homme, p.89). Le 2 juin, Juliette Leiris, sa cousine ou « sœur aînée » se marie avec Gustave Jannet (1883-1935). Le couple vit près des Leiris et Michel peut voir sa « sœur aînée » tous les jours. Durant l’été dans les Vosges, Michel est encouragé par son père à écrire ses impressions de voyage.

Le 3 mars 1911, Madeleine Jannet (1911-1966) naît (cf. L’Âge d’homme, p.26).

Le 1er mai 1912, Leiris fait sa première communion. Le 11 mai, il assiste avec ses parents à une représentation de l’adaptation théâtrale des Impressions d’Afrique de Raymond Roussel. En octobre il entre en cinquième au lycée Janson-de-Sailly à Passy, quartier plus riche qu’Auteuil.

En janvier 1914 il assiste à la première parisienne de Parsifal (1882) de Richard Wagner (1813-1883). En septembre, en raison de la guerre qui a commencé le 3 août, Michel, Juliette et Pierre sont envoyés à Biarritz. Michel tient un journal qui n’a pas été conservé. Il l’envoie à son père qui lui reproche dans une lettre son style. En octobre, il entre en classe de troisième avec un « zèle décroissant » (cf. Fourbis in Michel Leiris, La Règle du jeu, op. cit, p.416).

En juillet 1916, il finit sa classe de seconde avec les premiers prix de composition française et de latin et un renvoi pour sa mauvaise conduite. En octobre, il entre dans une boîte à bac pour faire sa première.

C’est en 1917 qu’il abandonne toute pratique religieuse. Pense-t-il déjà à se libérer de « l’emprise imbécile de la morale chrétienne » (L’âge d’homme, p.197) ? En juillet, il obtient la première partie de son baccalauréat avec l’indulgence du jury. En octobre, il commence sa classe de philosophie comme on nommait la terminale. En décembre meurt son oncle maternel, Léon Caubet (1860-1917), l’ « oncle acrobate » de L’âge d’homme qui l’a initié au cirque, au music-hall et lui a fait découvrir Charlie Chaplin (1889-1977) alias Charlot (cf. L’Âge d’homme, pp.75-79).

En 1918, Leiris découvre le jazz (cf. L’âge d’homme, p.159 et sq.), c’est-à-dire une musique de “nègres”. En juillet, il échoue à la deuxième partie du baccalauréat. Il le réussit à la session d’octobre.

En 1919, Leiris partage son temps entre sorties avec Jacques Dilly (l’homme à la tête d’épingle) et Maryse Demay (la Chouette) (cf. L’Âge d’homme, p.162 et sq.). Il est quelque temps employé de commerce.

À l’automne 1920, Leiris prépare et réussit l’examen d’entrée à l’Institut de chimie. Il y restera trois ans sans obtenir le diplôme.

Fin février 1921, il fait la connaissance de l’écrivain et poète Max Jacob (1876-1944), de Maurice Ravel (1875-1937) et Erik Satie (1866-1925). À partir du 3 mars il fréquente Max Jacob. Le 16 novembre 1921, son père décède après avoir été opéré de la prostate. Le 15 décembre Leiris commence au fort d’Aubervilliers son service militaire (cf. L’âge d’homme, p.179) qui se poursuivra à l’Institut Pasteur et qui durera deux ans, service qui lui permettra de vivre chez sa mère.

Au printemps 1922, il rencontre l’écrivain, poète et acteur Antonin Artaud (1896-1948) chez Max Jacob à Paris. Il commence son Journal qu’il tiendra avec des interruptions jusqu’à quelques mois avant sa mort. Fin juillet, il rencontre Roland Tual ( ????-1955) qui le présente peu après au peintre André Masson (1896-1987), « le peintre A.M. » de L’âge d’homme (p.186). Grâce à ce dernier, il devient un des membres du groupe de la rue Blomet qui comprend outre Tual, Masson, Artaud et lui, Georges Limbour (1900-1970). En novembre, Masson le présente au marchand d’art Daniel-Henry Kahnweiler (1884-1979) qui s’occupe notamment de Pablo Picasso (1881-1973) chez qui il fait la connaissance de sa future épouse Louise Godon (1902-1988), fille naturelle de Lucie Godon (1882-1945), la compagne de Kahnweiler. Elle passait pour la jeune sœur de sa mère. Ce secret connu de peu de personnes (dont Picasso) ne sera révélé qu’après la mort de Leiris. Le 7 décembre, il assiste à la générale de l’adaptation de Locus Solus de Roussel.

En 1923, Masson réalise, Joueur (portrait de Michel Leiris), un fusain sur papier. Il fait de multiples rencontres grâce à ses amis et relations. Il écrit. Le 15 décembre, il est libéré de son service militaire. Il abandonne ses études de chimie.

En janvier ou février 1924, il demande en mariage Louise Godon qui refuse (cf. L’âge d’homme, p.192). Il fait paraître un poème Désert de mains dans la revue Intentions. Masson expose pour la première fois en février et mars. Il rencontre Aragon (1897-1982), Paul Eluard (1895-1952), Philippe Soupault (1897-1990) et André Breton (1896-1966). Ce dernier lui achète un tableau, Les Quatre éléments. En avril, Leiris commence à s’éloigner de Max Jacob. Le 6 mai, il assiste à L’Étoile au front de Raymond Roussel. Nombre de surréalistes applaudissent pendant que de nombreux spectateurs sifflent. À l’un d’entre eux le poète surréaliste Robert Desnos (1900-1945) joignant le geste à la parole déclare : « Nous sommes la claque et vous être la joue. ». Durant l’été, il fait la connaissance de Raymond Queneau (1903-1976). C’est Limbour qui présente Leiris à Desnos en juillet. En septembre ou octobre, il rencontre Georges Bataille (1897-1962). En octobre, Breton publie le Manifeste du surréaliste, originellement la préface de Poisson soluble. En novembre, Leiris rejoint le groupe surréaliste. Le 1er décembre paraît le premier numéro de La Révolution surréaliste, la revue du groupe.

En janvier 1925, Antonin Artaud qui dirige pour un temps le Bureau de recherches surréalistes charge Leiris de constituer un « Glossaire du merveilleux » et un « Répertoire des idées surréalistes ». Ces travaux ne seront jamais achevés. À la mi-février il donne une série de récits de rêves intitulée « Le Pays de mes rêves » dans le n°2 de La Révolution surréaliste. Durant le premier trimestre, il rédige Point cardinal. Il fait partie des surréalistes qui s’allient aux communistes de la revue Clarté et à ceux du groupe Philosophies contre la guerre du Rif qui met aux prises des Marocains conduits par Abd el-Krim et l’armée française à partir du 13 avril. Le 26 avril est la date de l’achevé d’imprimer du premier livre de Leiris en collaboration avec André Masson intitulé, Simulacre, poèmes et lithographies. Le 2 juillet un banquet en l’honneur de Saint-Pol-Roux est organisé par le Mercure de France. Leiris, rossée par la foule est “sauvé” par la police qui le conduit au poste où il est passé à tabac. Il avait crié « À bas la France ! » et « Vive Abd el-Krim ! » (cf. L’Âge d’homme, p.191). En août il passe des vacances avec les Kahnweiler et Louise Godon. Il se fiance avec Louise le 7 (cf. L’Âge d’homme, pp.192-193). En septembre, un rapprochement entre les groupes Philosophies, surréalistes et Clarté est annoncé par cette revue. Durant l’hiver, les membres du groupe de la rue Blomet rencontrent ceux du groupe de la rue du Château, le peintre Yves Tanguy (1900-1955), le poète Jacques Prévert (1900-1977), Marcel Duhamel (1900-1977). Leiris les fréquentera assidûment. Le numéro 79 de la revue Clarté de décembre 1925-janvier 1926 publie « Les Illuminés. Les Faux Saulniers », une recension par Leiris de la publication du tome IV des Œuvres complètes de Gérard de Nerval (cf. L’âge d’homme, p.100).

En janvier 1926, le projet de revue La Guerre civile est annoncé par Clarté. Il devait fondre le groupe surréaliste et celui de Clarté. Il n’y aura pas de suite. Peut-être comme l’a soutenu bien plus tard un ancien du groupe Clarté, Victor Crastre dans Le drame du surréalisme (Editions le temps, 1963, p.87 et sq.), parce qu’eux, communistes, s’éloignaient du communisme pendant que quelques surréalistes s’en rapprochaient. Le 2 février Leiris se marie avec Louise Godon (la date est donnée p.193 de L’âge d’homme) et s’installe chez les Kahnweiler (cf. L’Âge d’homme, p.193). Il est un temps salarié par le couturier et mécène Jacques Doucet (1853-1929) pour un travail qui sera publié après sa mort : « Essai sur le merveilleux dans la littérature occidentale ». Durant l’été et à l’automne, Leiris publie en anglais deux textes sur les peintres contemporains, Miró et Masson dans la revue The Little Review. Le 22 août c’est en compagnie de Picasso qu’il assiste à sa première corrida à Fréjus (cf. L’Âge d’homme, p.73). Il en écrit le récit Grande fuite de neige en septembre. Il publie dans le numéro d’août-septembre de Clarté un article féroce contre Jean Cocteau (1889-1863) où il s’en prend également à Max Jacob et au poète Pierre Reverdy (1889-1960). En septembre il publie en allemand dans la revue Der Querschnitt, l’article « Paris-minuit » sur la vie nocturne et le jazz. En octobre, il devient représentant en librairie. Le 23 novembre, une assemblée de surréalistes refuse l’adhésion au Parti Communiste Français (P.C.F.). Leiris n’a pas d’avis, puis finalement opte pour une adhésion lors d’une autre assemblée le 24 décembre. C’est la période où Antonin Artaud et Philippe Soupault sont exclus ou partent du mouvement selon les versions, pour s’être opposés à l’inféodation au P.C.F. Artaud écrira quelques pamphlets contre le surréalisme et le communisme dont À la grande nuit ou le bluff surréaliste. Soupault plus discrètement se moquera de ses amis dans son roman, Le Nègre (1927). Breton, Aragon et Eluard sont les principaux surréalistes favorables à l’adhésion.

En janvier 1927, Leiris adhère au P.C.F. qu’il quitte au bout de six mois. Le Parti est occupé des querelles entre partisans de Staline (1878-1953) et partisans de Trotski (1879-1940) qui verra le triomphe des premiers en même temps que leur héros en U.R.S.S. En avril, il publie Point cardinal aux éditions du Sagittaire-Simon Kra dont la direction littéraire est assurée par Léon-Pierre Quint et Philippe Soupault. Le 11 avril Leiris s’embarque pour l’Égypte (cf. L’âge d’homme, p.139) pour sortir d’une dépression et va rejoindre Limbour qui enseigne au lycée français du Caire. Il y séjourne jusqu’au 25 juin. Il est même un court moment examinateur de français au baccalauréat pour se faire un peu d’argent. Il rentre en France en passant par la Grèce, puis l’Italie. Sa dernière contribution à La Révolution surréaliste et la dernière déclaration surréaliste qu’il signe est d’octobre.

En 1928, Leiris en compagnie de Queneau et de l’encore poète surréaliste Jacques Baron (1905-1986) apparaît au « Cercle communiste Marx et Lénine », futur « Cercle communiste démocratique », créé en 1926 par Boris Souvarine (1895-1984), qui a été exclu du P.C.F. en 1924. Le cercle s’oppose au stalinisme. Peut-être à la fin de l’année ou au début de 1929, il propose, sans succès, Aurora aux Éditions du Sagittaire.

À partir de février 1929 où il publie cinq poèmes, il collabore régulièrement à la revue les Cahiers du Sud. Il rompt avec le surréalisme. En avril paraît le premier numéro de Documents, revue fondée par Georges Henri Rivière (1897-1985), sous-directeur du musée d’ethnographie du Trocadéro, Carl Einstein (1885-1940) et Georges Bataille. En juin, il fait la connaissance par l’intermédiaire de Masson du sculpteur et peintre suisse Alberto Giacometti (1901-1960). Le 3 juin il entre à Documents comme secrétaire de rédaction. Il publie un chapitre d’Aurora dans les Cahiers du Sud et un poème dans le numéro 2 de Bifur, revue fondée par l’ex dadaïste, Georges Ribemont-Dessaignes (1884-1974). Il publie le 1er juillet un poème dans la Nouvelle Revue Française (N.R.F.). En août il fait la connaissance de Marcel Griaule (1898-1956), élève du sociologue Marcel Mauss (1872-1950), qui revient d’Éthiopie. Cette rencontre est importante pour sa carrière future d’ethnographe. Fin août, il passe des vacances en Italie. Il publie un article dans le numéro de septembre de Documents sur la « revue nègre » des Lew Leslie’s Black Birds et un autre sur Giacometti. En octobre, il publie un article sur Miró. En novembre, il fait le compte rendu de L’Île magique de William B. Seabrook sur Haïti et le culte vaudou. En novembre, sur les conseils de Bataille et avec le même médecin que lui, le Dr Adrien Borel (1886-1966), il entreprend une cure psychanalytique (cf. L’âge d’homme, p.196 et sq.). En novembre ou décembre, la publication de Glossaire j’y serre mes gloses est annoncée. Elle aura lieu plus tard. En décembre, il publie dans Documents « Une peinture d’Antoine Caron ». Dans son Second manifeste du surréalisme, Breton s’en prend aux anciens surréalistes qui ont refusé la soumission au stalinisme.

En 1930, Leiris assiste à quelques cours de Marcel Mauss à l’Institut d’ethnologie. Le 15 janvier, paraît un pamphlet collectif contre Breton intitulé « Un cadavre ». La contribution de Leiris est intitulée « Le Bouquet sans fleurs ». En février ou mars, Leiris publie un article sur le pianiste et chef d’orchestre de jazz Duke Ellington (1899-1974) « Disques nouveaux » et un premier article sur Picasso. De fin août à début septembre, il entreprend une randonnée solitaire en Catalogne qui inspire le poème « Le Promeneur de Barcelone ». Fin septembre Leiris et sa femme quittent les Kahnweiler faute de place et s’installent chez la mère de Michel dans le xvi° arrondissement. Au début de l’automne, il découvre en photographie un diptyque de Lucas Cranach l’Ancien qui le bouleverse, Lucrèce et Judith (cf. L’Âge d’homme, p.39). En novembre, il publie dans Documents « L’Œil de l’ethnographe » où il livre les raisons de son départ avec la future mission Dakar-Djibouti (cf. L’âge d’homme, p.198 et sq.). En décembre, il écrit « Lucrèce, Judith et Holopherne », un texte demandé par Bataille pour un Almanach érotique. La publication échoue.

En janvier 1931, recommandé par G. H. Rivière, Leiris est officiellement recruté par Marcel Griaule comme secrétaire-archiviste et enquêteur en ethnologie religieuse plus particulièrement chargé des sociétés et rituels initiatiques de la mission ethnographique et linguistique, Dakar-Djibouti. Il interrompt sa cure psychanalytique sur les conseils de son praticien qui l’encourage à participer à ce long voyage. En mars Leiris rédige les Instructions sommaires pour les collecteurs d’objets ethnographiques, conçues par Griaule à partir des cours de Marcel Mauss. Leurs destinataires étaient les voyageurs et les administrateurs des colonies. Le 19 mai la mission embarque. Elle comprend six personnes outre Michel Leiris : Marcel Griaule en est le chef, Marcel Larget, naturaliste est le second de la mission chargé de l’intendance, Éric Lutten chargé des enquêtes sur les technologies et des prises de vue cinématographiques, Jean Mouchet pour les études linguistiques et Jean Moufle pour les enquêtes ethnographiques. Ces deux derniers ne resteront que quelques mois. Quatre autres personnes la rejoindront ultérieurement dont le musicologue André Schaeffner et le géographe et naturaliste Abel Faivre. Du 31 mai au 9 septembre la mission séjourne à Dakar puis par le train et la route arrive à Sanga (dans l’actuel Mali). Du 29 septembre au 19 novembre Leiris étudie la langue initiatique de la société des hommes chez les Dogons. Du 20 novembre au 26 décembre avec trois membres de la mission, il se rend par la route jusqu’au golfe de Guinée puis remonte vers le nord jusqu’à Niamey (Niger) où il retrouve le reste de la mission venus en bateau par le fleuve Niger. Du 26 au 31 décembre la mission fait route vers Damatoulou (Nigeria).

Du 1er janvier au 21 février 1932 la mission quitte Damatoulou pour le Cameroun. Le 19 janvier Schaeffner rentre en France avec le Journal de Leiris. Du 22 février au 1er mars la mission séjourne à Yaoundé (Cameroun). Du 1er au 29 mars, la mission gagne par le route l’Oubagui-Chari (Centrafrique) puis le Congo belge (actuelle République démocratique du Congo) et enfin Juba (actuel Soudan). Du 29 mars au 4 avril Leiris qui séjourne à Juba écrit deux projets de préface pour la publication de son Journal. Il écrit en ce sens à sa femme et à Kahnweiler pour qu’ils prennent contact avec Malraux ou Paulhan chez Gallimard. Du 4 au 20 avril, par bateau sur le Nil Blanc puis par la route, la mission gagne Gallabat à la frontière égyptienne. Du 20 avril au 31 mai, la mission séjourne à Gallabat en attendant l’autorisation des autorités éthiopiennes (l’Éthiopie est, à cette époque, un des rares pays africains indépendant). Du 1er juin au 1er juillet la mission gagne Gondar en Éthiopie à dos de mulet et d’âne. Durant trois semaines Leiris remplace à la tête de la mission Griaule qui arrive en caravane le 20 juin. Du premier juillet au 5 décembre la mission séjourne à Gondar. À la mi-juillet la linguiste Deborah Lifchitz (1907-1943) et le peintre Gaston-Louis Roux (1904-1998) puis Abba Jérôme Gabra Mussié (1881-1983) un lettré éthiopien mis à la disposition de la mission par son gouvernement se joignent à la mission. Avec ce dernier, Leiris étudie le culte des génies zars. Leur principale informatrice est Malkam Ayahou, guérisseuse et grande prêtresse d’un groupe de possédés. Leiris s’éprend de sa fille Emawayish (cf. L’Âge d’homme, p.199). Du 5 au 31 décembre la mission quitte Gondar pour gagner Asmara (Érythrée) à dos d’âne et de mulet puis en train.

Du 1er au 7 janvier 1933, la mission demeure à Asmara, puis arrive le 10 à Djibouti par le train puis le bateau. Du 10 janvier au 4 février la mission séjourne à Djibouti et Addis-Abeba. Griaule et Leiris sont reçu par le négus (roi ou empereur) Hailé Sélassié (1892-1975). Du 7 au 17 février la mission gagne la France où elle débarque à Marseille. Michel Leiris pense avoir « tué au moins un mythe : celui du voyage en tant que moyen d’évasion. » (cf. L’âge d’homme, p.200). Il devient ethnographe (cf. L’Âge d’homme, p.25). Il publie dans Masses, revue mensuelle d’action prolétarienne un article sur « La Jeune Ethnographie ». Il suit assez régulièrement les cours de Marcel Mauss à l’École pratique des hautes études (V° section) et ceux qu’il donne à l’Institut d’ethnologie. Au printemps il porte son journal de route intitulé Voyage en Afrique. De Dakar à Djibouti à André Malraux (1901-1976) chez Gallimard. C’est à sa demande qu’il trouve un titre plus accrocheur, L’Afrique fantôme. Le 1er juin paraisse les deux premiers numéros de Minotaure dont le premier numéro comprend un fragment de L’Afrique fantôme. Le numéro 2 composé par Leiris est consacré à la mission Dakar-Djibouti. Du 1er juin au 29 octobre une exposition est consacrée à la mission au musée d’Ethnographie du Trocadéro. Il devient boursier puis aide-technique à la Caisse nationale des sciences – englobée au Centre National de la Recherche Scientifique (C.N.R.S.) à sa création en 1939 – et attaché au musée d’Ethnographie du Trocadéro. De la fin juillet au 5 septembre il séjourne avec sa femme en Bretagne. Dans une lettre à l’écrivain Jouhandeau (1888-1979) il écrit qu’il a le projet d’« un grand livre qui serait une totale mise à nu, mais sans aucun cynisme ». Il relit Rousseau (1712-1878), notamment les Confessions (posthume 1782). En septembre il publie grâce à Bataille dans La Critique sociale, revue fondée en mars 1931 par Boris Souvarine. Le 1er décembre, la N.R.F. publie des fragments de L’Afrique fantôme.

En 1934, il éprouve une passion pour Hélène Gordon (1909-1988) qui fondera le journal Elle après la guerre. Il finit par se rendre compte qu’elle se joue de lui. C’est au musée d’Ethnographie qu’il rencontre l’ethnologue Alfred Métraux (1902-1963) qui rentrait d’un long séjour en Amérique du Sud. Il lui reconnaît une dette (cf. L’introduction de « Regard vers Alfred Métraux » in Cinq études d’ethnologie, Paris, Gallimard, Tel, 1969, pp.129-132). Il publie en janvier L’Afrique fantôme, qui porte en exergue une citation des Confessions de Rousseau « Moi seul. Je sens mon cœur… ». Griaule n’apprécie pas le livre qui lui est dédié. En février ou en mars, Leiris et son épouse emménagent dans leur propre logement. Le 10 février Leiris signe l’« Appel à la lutte » rédigé à l’initiative de Breton suite à la manifestation de l’extrême droite du 6 février. Le 12, Leiris participe à la manifestation parisienne à l’appel des partis de gauche et des syndicats. Il signera différents textes par la suite contre l’extrême droite. Début avril il rédige dans son Journal un début d’autobiographie qui formera, remanié, le prologue de L’Âge d’homme. En avril-mai Leiris publie le récit Grande fuite de neige de la première corrida à laquelle il avait assisté dans les Cahiers du Sud (cf. L’âge d’homme, p.73). Le 29 juin il reprend sa cure psychanalytique. Au cours du deuxième semestre il publie ses premiers articles de chercheur africaniste dans différentes revues françaises et américaines. Il est chargé du département Afrique noire du musée d’Ethnographie du Trocadéro. Son mémoire sur la langue secrète des Dogons présenté à l’École pratique des hautes études est ajourné par l’islamologue Louis Massignon (1883-1962). D’août à septembre il séjourne en Catalogne espagnole (cf. L’âge d’homme, p.74). À la fin de l’année il entreprend la rédaction de L’Âge d’homme à partir de « Lucrèce, Judith et Holopherne » écrit en 1930.

En janvier 1935, il commence à suivre les cours sur les religions de Maurice Leenhardt (1878-1964) à l’École pratique des hautes études. En février, il fait la connaissance chez la princesse Marie Bonaparte (1882-1962), traductrice de Freud (1856-1939), d’un jeune psychanalyste, Jacques Lacan (1901-1981). En avril, la N.R.F. publie des fragments de Comment j’ai écrit certains de mes livres de Raymond Roussel avec une introduction de Leiris : « Documents sur Raymond Roussel ». Il publie un autre texte sur Roussel « Le Voyageur et son ombre » dans le numéro 1 de La Bête noire. D’août à septembre, Leiris et sa femme font le tour de l’Espagne en cargo. En septembre, ils séjournent à Tossa chez les Masson. En novembre, il commence une licence de lettres à la Sorbonne. Le livre de Raymond Roussel, Comment j’ai écrit certains de mes livres dont l’édition posthume a été réalisée par Leiris paraît. Il achève L’Âge d’homme qu’il avait repris au début de l’automne. Fin décembre, Paulhan accepte de le publier dans la collection « Métamorphoses » chez Gallimard.

Il publie le 15 janvier 1936 « La Néréide de la mer Rouge » dans Mesures. En février ou en mars, il met fin à son analyse avec le Dr Borel. Le 16 juin, il obtient le certificat d’histoire des religions (option religions primitives), le 21 novembre, celui de sociologie. Fin juin, les Leiris séjournent en Espagne et aux Baléares avec les Queneau. Le 18 juillet le général Franco (1892-1975) et ses troupes attaquent la République. Les Leiris et les Queneau sont rapatriés en France le 26 juillet. Des fragments de L’Âge d’homme sont publiés en juillet dans la revue Mesures. Le 1er décembre, il publie un article sur le peintre et inventeur des ready-made Marcel Duchamp (1887-1968) dans la N.R.F. intitulé « La Mariée mise à nu par ses célibataire, même ». Du 7 au 19 décembre Masson expose : « Espagne 1934-1936 ». Leiris en fait deux comptes rendus.

En mars 1937 le Collège de sociologie est fondé par Bataille et Roger Caillois (1913-1978). Leiris devient un des membres fondateurs quelques temps après. En juin, il obtient son certificat d’ethnologie (options : linguistique et Afrique noire). En août il publie Tauromachies avec un dessein d’André Masson. En octobre, il publie un texte « Faire-part » pour le numéro spécial consacré à Guernica de Picasso dans les Cahiers d’art. Le 21, il obtient le diplôme de langue amharique, la langue la plus parlée en Éthiopie, de l’École nationale des Langues orientales vivantes.

Le 8 janvier 1938, il fait une conférence au Collège de sociologie : « Le Sacré dans la vie quotidienne », qui sera publiée dans la N.R.F. de juillet. Au printemps, le désormais licencié ès lettres Michel Leiris est nommé chef de service au Laboratoire d’ethnologie du Muséum national d’histoire naturelle. Il présente à nouveau son mémoire sur la langue secrète des Dogons de Sanga en juin et obtient son diplôme des hautes études, section des Sciences religieuses. C’est la fin de ses études. Le 20 juillet, il publie un essai, Miroir de la tauromachie avec trois dessins de Masson. Le 1er novembre est publiée dans la N.R.F. une « Déclaration du Collège de sociologie sur la crise internationale » cosignée par Caillois, Bataille et Leiris.

En 1939, Leiris rencontre le poète René Char (1907-1988) et le compositeur et chef d’orchestre René Leibowitz (1913-1972). Il publie L’Âge d’homme le 15 juin 1939 avec un prière d’insérer écrit pour l’occasion. Il est mobilisé la même année dans le Sud Oranais. Il publie le 9 août Glossaire, j’y serre mes gloses illustrées de lithographies de Masson. Toujours en août il voyage en Grèce. Pendant la drôle de guerre, le maréchal des logis chimiste Leiris est affecté au 22ème Bataillon d’Ouvriers d’Artillerie (B.O.A.). Le 19 septembre, il arrive à Beni-Ounif à la frontière de l’Algérie et du Maroc.

 

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Bonjour!...je voudrais bien lire la suite de votre article
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